Sortie le 11 mars
Petite musique de vie
Alix Delaporte nous propose son second long métrage. Elle impose un regard personnel sur ce septième art qui a besoin de sa sensibilité pour proposer autre chose que les produits convenus de la qualité française. Vous allez, grâce à elle, vivre un instant en suspens, un moment de grâce, magnifié par un jeune acteur au regard étonnant et une photographie magnifique.
Victor est un adolescent qui vit dans des conditions pas faciles. Pourtant, lui n'a pas choisi les solutions habituelles qui sont toujours mises en avant. Il n'est pas délinquant, il travaille bien à l'école, aime sa mère qui l'élève seule, fait du football en club et s'occupe avec patience d'un petit garçon à qui il veut apprendre la français.
Alors, comment faire un film avec des bonnes intentions ? Simplement en allant à l'essentiel : les regards, les silences, les images magnifiques d'une Camargue somptueuse. Aucun misérabilisme alors que Victor et sa mère vivent dans un caravane dans un espace incertain en bordure de plage. Nadia, sa mère, est malade, très malade et, même si elle est à bout, il émane d'elle une flamme formidable.
Alix Delaporte nous invite à un nouvel éveil. Celui de son héros, Victor, qui va à la rencontre d'un père qui s'ignore et qu'il n'a jamais connu. Samuel est un chef d'orchestre réputé, il prépare une cérémonie de concerts à l'opéra de Montpellier. De sa baguette sensuelle et gourmande, il dirige la 6ème symphonie de Mahler, pour notre plus grand plaisir de spectateur.
La musique, la mer, l'amour, la mort qui rôde. Une alchimie qui fonctionne au travers de ce garçon formidable : Romain Paul qui a reçu le prix Marcello Mastroianni du jeune acteur au Festival de Venise. Sa vie bascule, il met provisoirement l'école et le sport entre parenthèses pour aller à la rencontre d'un père et de sa musique.
Des dialogues ciselés, épurés, des images somptueuses où le jeu sur la profondeur de champ nous emporte, une musique enveloppante, sont les principaux ingrédients d'une véritable réussite. Ce film ne se raconte pas ; il faut le découvrir par le cœur, en se laissant porter par son rythme tranquille. N'attendez pas de scènes spectaculaires, de rebondissements ou de grandes tirades ; vous entrez dans un film intimiste qui ne vous lâchera plus.
Qu'importe alors que vous ne puissiez restituer le parcours des uns et des autres. Le cinéma, ce n'est pas l'exposition de biographies détaillées. Alix Delaporte, la réalisatrice, nous convie à ce moment clef dans la vie de Romain. C'est un passage initiatique à plus d'un titre. Acceptez d'en être de simples témoins discrets.
Vous comprendrez alors que le cinéma c'est l'image et c'est aussi des acteurs. Ici, ils sont tous exceptionnels. Trois d'entre eux ont reçu des prix : Clotilde Hesme pour cette mère cabossée, épuisée, magnifique, Grégory Gadebois pour ce chef hédoniste et ce père en devenir et Romain pour toute sa performance. Il ne faut pas oublier également la belle Luna qui éveille Victor à la sensualité.
Le film sortira le 11 mars. Je vous invite à vous y précipiter. Si mes explications ne sont pas suffisantes, je vous offre la fiche officielle de ce joli travail cinématographique. L'essentiel est, bien sûr, que vous ayez, vous aussi, l'envie de savoir ce qu'est ce dernier coup de marteau. Résonnera-t-il pour Nadia ? Est-il destiné à quelqu'un d'autre ? Je ne vous en dirai pas plus. La curiosité s'impose.
Admirativement leur.
Synopsis et détails
Quand Victor, 13 ans, pousse la porte de l'opéra de Montpellier, il ne connaît rien à la musique. Il ne connaît pas non plus son père venu diriger. Il l’observe de loin, découvre l'univers des répétitions... Le jour où Nadia, sa mère, lui annonce qu’ils doivent quitter leur maison sur la plage, Victor s’inquiète. Pour sa mère, dont il sent qu’elle lui cache quelque chose, mais aussi pour sa relation naissante avec Luna, la voisine espagnole. Victor décide alors de se montrer pour la première fois à son père...
Chacun son prix
Les trois acteurs principaux du second long-métrage d'Alix Delaporte ont chacun reçu un prix pour leurs interprétations respectives. En effet, Clotilde Hesme a été récompensée au Festival de Marrakech par le prix d'interprétation féminine, Grégory Gadebois s'est vu décerner le prix d'interprétation masculine au Festival de Saint-Jean-de-Luz. Pour finir, le jeune comédien Romain Paul a reçu le prix Marcello Mastroianni du jeune acteur au Festival de Venise.
Un titre évocateur
Alix Delaporte a choisi le titre Le Dernier coup de marteau en relation avec la 6ème symphonie de Gustav Mahler, qui se termine par trois coups de marteau. Cette symphonie est celle qui est jouée dans le film, par l'orchestre mené par le personnage de Samuel Rovinski (interprété par Grégory Gadebois) Ces trois coups ont une raison, il s'agissait pour le compositeur de représenter les trois moments qui ont dévasté sa vie : la mort de sa fille, son éviction de l'opéra de Vienne et le moment où on lui a diagnostiqué une maladie au cœur.
Duo gagnant
Alors qu'ils tombent amoureux dans Angèle et Tony, son premier film, Clotlide et Grégory se retrouvent une nouvelle fois sous l'œil sensible d'Alix Delaporte , où, cette fois, ils sont séparés. Après avoir chacun remporté le prix du meilleur espoir masculin et le prix du meilleur espoir féminin aux César, ainsi que divers prix pour ce nouveau duo, nous pouvons dire avec certitude qu'on ne change pas une équipe qui gagne.
Diriger sans diriger
La réalisatrice Alix Delaporte avoue de pas avoir vraiment "dirigé" le jeune acteur Romain Paul pour ce premier rôle car elle souhaitait garder le naturel de cet adolescent : "Aucune envie de psychologie, ni de sa part, ni de la mienne. Je n’ai pas cherché à le faire « jouer », je me suis appuyée sur des choses concrètes comme mon envie que lui, Romain, auquel je m’attachais de plus en plus, commence à comprendre une musique qui lui est très étrangère."
Lieux prestigieux
Le tournage des répétitions de l'orchestre s'est déroulé à l'Opéra Berlioz de Montpellier. La réalisatrice s'est ensuite déplacée dans les Bouches-du-Rhône, pour le reste des enregistrements.
Un regard qui en dit long
Le jeune comédien Romain Paul a passé une audition à Montpellier, suite à une annonce découverte par sa tante. Alix Delaporte ajoute qu'elle a choisi ce jeune homme surtout grâce à l'intensité de son regard : "Quand j’ai regardé ses essais filmés au milieu d’une dizaine d’autres ados, c’est son regard qui m’a arrêtée. La sincérité de son regard, la profondeur aussi et en même temps, la place que ce regard laisse à notre interprétation. (...) Et puis ce qui me surprenait toujours beaucoup, c’est qu’il ne baissait jamais les yeux quand il s’adressait aux autres acteurs et en particulier à son père, joué par Grégory Gadebois. Il soutenait tous les regards, sans presque jamais ciller des yeux."